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Concertation actions monoparentalité Mairie de Paris : Pour un statut municipal de parent isolé ?

Invitation de la Collective des Mères Isolées pour l’occasion de la concertation organisée par la Mairie de Paris sur les actions à mener en direction des famille monoparentales. Articuler propositions législatives et mesures locales afin de pouvoir harmoniser d’une municipalité à l’autre des pratiques qui prennent en compte les diffcultés rencontrées au quotidien par les mères isolées et de leurs enfants, voilà ce qu’a défendu la Collective des Mères Isolées au côté des associations partenaires.

5 priorités pour la Collective des Mères Isolées afin de résorber le cycle des violences institutionnelles, économiques et sociales faites aux mères isolées et à leurs enfants : le travail, le logement, la santé, la justice, l’accès à la culture et aux loisirs. Ce sont les points que mettra à l’étude cette commission a également rappelé Emmanuelle Lerock, conseillère de l’adjoint à la Maire de Paris, Patrick Bloche, concertation co-organisée avec les équipes du pôle petite enfance, représentées par Adeline Bodin, Xavier Vuillaume (directeur du pôle petite enfance) et Stéphanie Veneziano (Conseillère petite enfance de Madame le Maire de Paris), ainsi que les équipes de la mission famille de la DFPE de Paris, représentée par Elisa Merlo Zeitoune.

Abordé ce jour dans l’hémicycle, la question de l’accès à l’emploi des familles monoparentales. Une problématique lourdement genrée que celle du travail, qui se sur-ajoute à l’ensemble des problématiques afférentes à la monparentalité pareillement genrées.

Les inégalités devant l’emploi sont en effet gravées de facto avec un différentiel salarial moyen femme-homme de 8% en moyenne. Dès l’arrivée du premier enfant les inégalités se creusent encore plus avec un différentiel de revenu entre le père et la mère de 28%, puis 65% avec l’arrivée du 2ème enfant et enfin 165% pour une mère ayant 3 enfants ou plus (à lire les travaux de Violaine Dutrop sur les questions de parentalité et d’égalité).

Il en résulte à l’échelle des familles monoparentales, majoritairement portées par des mères isolées, une précarisation à marche forcée. Dans 55% des cas ces familles monoparentales sont pauvres et ce à raison. 1/3 des mères isolées sont sans emploi car elles doivent s’occuper de leurs enfants. Un premier espoir de voir les mères retourner à l’emploi avec la prolongation du Complément de Mode de Garde aux 12 ans de l’enfant (et non 6 ans actuellement) voté pour une mise en application en septembre 2025. Mais cela suffira-t-il ?

Nombre de problématiques ont été soulevées à l’occasion de cette réunion diligentée par la Ville de Paris, et notamment le fait que les mères, même en emploi, n’en restent pas moins souvent condamnées à des temps partiels subis (dans 20% des cas) ou des CDD (dans 37% des cas). Préserver sa carrière ou retourner vers l’emploi après la naissance d’un enfant, sans une réforme en profondeur du monde du travail, reste une gageure pour les mères en raison de la distribution encore très genrée des rôles auprès de l’enfant dans notre société. Et pour preuve 17.2% des mères se trouvent en situation de chômage dit « découragé ». A noter qu’elles sont aussi surreprésentées dans les métiers faiblement qualifiés. Sont-elles donc condamnées à l’abandon de carrière à marche forcée ?

La garde d’enfant est un levier majeur au retour à l’emploi des mères. Mais outre la prolongation du CMG, nombre d’obstacles restent à lever, à commencer par les coûts en constante augmentation depuis 2014 (le rapport de l’IRES 2022 souligne une augmentation de +15.6%). Dans le même temps le nombre d’assistantes maternelles n’a cessé de diminuer. Il en va de même pour les places en crêches municipales, départementales ou associatives qui n’offrent pour l’heure pas d’accès prioritaire aux mères isolées. Dans la réalité, 56% des parents français gardent leurs enfants. Comment font les mères isolées en l’absence du revenu compensatoire du parent en activité ? Et quand il faut ponctionner sur l’unique revenu d’une mère isolée des frais de garde coûteux, le salaire est amputé à tel point, que finalement, interrompre l’activité professionnelle et se mettre au RSA pour garder son enfant, s’avère éla solution économiquement la moins pénalisante pour une mère isolée. Non elle n’est pas un « cassos », mais elle est dans l’impossibilité de conserver son activité ou bien à quel prix ?

A l’échelle nationale, bien sûre qu’il y’a urgence à réformer le code du travail pour permettre plus de flexibilité horaire pour tout parent qui aurait la charge de garder son enfant. A l’échelle locale, les municipalités peuvent beaucoup, car il est de leur ressort d’agir sur les modes de garde. La Collective des Mères Isolées rappelle donc l’importance de pouvoir prioriser l’accès aux mode de garde aux parents isolés afin qu’ils puissent travailler.

Si la mairie de Ris Orangis a voté sous la direction de Stéphane Raffalli et son adjointe Semira Lequerec l’an passé un corpus de 21 mesures à la faveur des familles monoparentales, la Collective rappelle l’importance de pouvoir harmoniser les pratiques. A titre d’exemple, les engagements des municipalités de Montpellier et de Ris Orangis qui offrent de véritables plans d’action en regard de la question des modes de garde pour les familles monoparentales, avec notamment l’attribution de points de bonification pour les familles monoparentales, des places AVIP spécifiques pour pouvoir accéder aux modes de gardes sur des horaires atypiques et un calcul plus équitable du quotien familial (calcul à N-0 et avec une demi-part supplémentaire pour le parent isolé) pour un cout de revient moins honéreux des frais de garde.

Cela suffira-t-il ? Non. Il va falloir permettre l’accompagnement vers l’emploi des parents, dans l’immense majorité des cas les mères puisqu’elles sont moins souvent en emploi que les pères. Pour les mères isolées, 33% d’entre elles ont du renoncer à l’emploi. La municipalité de Ris Orangis s’est également attelée à cette question en proposant un accompagnement des parents isolés vers le retour à l’emploi. Ris Orangis profitera également de son rendez-vous annuel du café des entrepreneurs pour sensibiliser les entreprises locales aux problématiques liées à la monoparentalité. La flexibilité horaire est un enjeu majeur pour permettre un retour efficient à l’emploi des mères isolées. Les municipalités pourraient aussi encourager l’entrepreunariat au féminin via les couveuses d’entreprises et en s’appuyant également sur le maillage associatif local. Les propositions émanant du tissu associatif en faveur de l’insertion professionnel ne manquent pas, encore faut-il savoir coordoner et mettre à profit ces moyens.

Un autre point d’ombre, les inégalités femmes-hommes sur le marché du travail. Comme l’a fait remarquer Xavier Vuillaume, les inégalités salariales sont en partie dûes aux primes, notamment le système de prime horaire atypique, qui profite majoritairement aux hommes sur les services municipaux de la mairie de Paris. C’est en partie là que se joue le différentiel salarial femme-homme. Et cela n’échappe pas aux syndicats. A quand donc une réforme en profondeur du monde du travail pour permettre aux mères comme aux pères d’être, à hauteur de leurs appétences et compétences, en activité ?

Enfin, pour poser une dernière pierre à l’édifice de ce qui se construit sur la Ville de Paris à la faveur des familles monoparentales, il n’échappe pas à la Collective des Mères Isolées, que quand on est maman d’un enfant en situation de handicap visible ou invisible, rester en activité relève du marathon quotidien en raison de l’insuffisance des moyens en terme d’accomapagnement. Quid de l’emploi des parents pour les familles en situation de handicap. La dernière enquête de l’INSEE le prouve, c’est également encore une question genrée, et pour les mères isolées, c’est un effet triple peine. Dans 9 cas sur 10, le parent aidant auprès de l’enfant est la mère et 33% des familles faisant face à une situation de handicap sont des familles monoparentales. Pour les oublié.e.s de l’égalité, les mères, les enfants invisibilisés derrière la maladie ou le handicap, la Collective des Mères Isolées réclame donc aussi des droits, un du. Elle rappelle à l’état son devoir en regard des lois de 2005 et de 2015 sur l’inclusivité en entreprise et à l’école, car un enfant à besoin particulier accompagné, scolarisé, c’est une mère qui est en mesure de travailler.

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